Communication responsable : principes et bonnes pratiques

Véronique SouchetManager des offres Techniques d'Expression Écrite et Orale, Communication Interne et Externe et PAO chez Cegos
Céline ChaudeauJournaliste

La communication responsable fait souvent l’objet de controverses. Pourtant, il existe des principes et bonnes pratiques pour poser un récit de marque crédible sur ses engagements RSE, aligner son discours avec sa stratégie et ses actions. Les communicants sont aux manettes d'une profonde transformation avec un rôle de conseil et d’influenceur. Focus sur quelques bonnes pratiques pour inspirer le changement. 

Communication responsable : définition et enjeux

Communication responsable, de quoi parle-t-on ?

L’Ademe donne la définition suivante : « La communication responsable correspond non seulement à la communication qui porte sur des questions de responsabilité d’entreprise, mais elle intègre aussi la responsabilité des actions de communication. C’est une communication plus sensible aux enjeux écologiques, davantage à l’écoute du vivant, une communication qui s’interroge autant sur le fond et sur la forme des messages, une communication qui intègre également la notion d’urgence. »

Ses 4 piliers principaux sont :

1. L’éco-communication, c’est-à-dire la diffusion de messages éco-responsables ; ce qui permet notamment d’éviter le greenwashing.

2. L’éco-socio-conception,qui correspond à la prise en compte de la dimension environnementale et sociale des actions de communication (cycle de vie, sobriété, accessibilité, inclusion etc.).

3. La co-construction avec les parties prenantes, c’est-à-dire les salariés, collaborateurs, partenaires, consommateurs, usagers ou ONG, afin d’identifier les opportunités de collaboration et adopter une démarche collective et sincère.

4. L’efficacité et l'éthique des affaires, qui interroge et intègre les sujets de gouvernance.

« La communication responsable, c’est une communication qui prend ses responsabilités dans un contexte de transition écologique et sociale », résume Véronique Souchet,manager offre & expertise Communication chez Cegos et animatrice d’un récent webinar sur le sujet. « La communication est aussi perçue comme une opportunité unique de création de valeur. C’est un nouveau métier pour accompagner les marques dans leur transformation, les citoyens vers de nouvelles façons de consommer, et avancer vers une démarche de progrès » , ajoute-t-elle. Il s’agit aussi de développer une représentation plus inclusive de la diversité de la société.

Selon une étude menée en juin 2024 par l’Adetem et Opinion Way, 40 % des professionnels interrogés déplorent que la RSE soit réduite au minimum obligatoire au sein de leur entreprise. Or 85 % estiment que le marketing et la communication responsables occupent justement une place centrale pour imaginer de nouveaux modèles plus responsables et économiquement viables.

Communication responsable
Réinventer ses pratiques et communiquer autrement

La communication responsable et la Théorie du Donut

« Quand on se projette à horizon 2030-2050, nos représentations du monde ne sont guère optimistes », admet Véronique Souchet. « Nous avons aujourd’hui déjà dépassé 6 des 9 limites planétaires. Il est urgent de sortir des représentations moralisatrices et culpabilisantes, pour avancer et dépasser le statut quo. »

Comment réinventer sa communication responsable ? Pour y parvenir, notre experte cite l’économiste britannique Kate Raworth : « En économie, l’outil le plus puissant, c'est un crayon, parce qu'avec un crayon, vous pouvez redessiner le monde. »

Cette Britannique est connue pour avoir développé la Théorie du Donut.

Quel est le rapport entre l’écologie et un beignet américain ? La chercheuse dessine deux cercles. Le premier qui représente le plafond écologique constitué des 9 limites planétaires. Le second représente le plancher social liés aux besoins essentiels attachés à chaque personne. La théorie du Donut offre une vision globale et équilibrée des enjeux auxquels les organisations et la société doivent répondre, et peut servir de cadre pour guider la communication responsable.

Communication responsable et urgence de créer de nouveaux récits

Pourquoi créer de nouveaux récits ?

« Malheureusement, dans les récits dominants actuels, il y a des histoires qui sont bloquantes et obsolètes au regard des enjeux écologiques », alerte Laëtitia Guibert, consultante et formatrice en transformation soutenable des organisations et cofondatrice de l’association de La Fresque des Nouveaux Récits. « Il est urgent de repenser ces règles du jeu et la manière de communiquer dans les organisations ». 

La Fresque des Nouveaux Récits se révèle alors comme un nouvel outil utile pour poser les bases d’une communication responsable. Créé en 2020, cet atelier permet, à des représentants de différents services de se réunir pour dessiner un futur désirable compatible avec les limites planétaires. L’objectif : mobiliser les capacités cognitives des humains pour imaginer de nouveaux récits.

De nouveaux récits émergent

« Les récits publicitaires actuels de manière générale, nous racontent comment être heureux, poursuit cette spécialiste. Mais être heureux aujourd’hui, qu'est-ce que c'est ? C'est posséder, c'est acheter… ». Ce récit du matérialisme est lié à l’american way of life. «  Or, il y a aujourd'hui un impact avéré de notre hyperconsommation sur l’état de la planète. Il est urgent de repenser nos imaginaires publicitaires. »

De nouveaux récits sont possibles. En 2011, la marque Patagonia lançait une veste avec le slogan "N'achetez pas cette veste". Autrement dit : si vous avez déjà des vestes chez vous, peut-être n’avez-vous pas besoin de celle-là. Plus récemment, des entreprises comme Aigle ou Camif ont joué la carte de l’anti-Black Fridaypour dénoncer le coût environnemental de cet événement…

Pas de communication responsable sans l’alignement de toute l’organisation

La communication responsable peut-elle changer le monde ? « Il y a un enjeu aujourd'hui à changer ses discours, assure Laetitia Guibert. Car en transformant le récit, je contribue aussi à faire changer la société. Les études montrent qu’il suffit que 15 à 25 % des acteurs initient une nouvelle manière de faire pour que cela soit suivi par la majorité. »

Ce constat est encourageant, à condition d’embarquer toute son organisation, à commencer par la direction sur un narratif commun. « Il faut avoir une vision macro, globale, économique pour pouvoir embarquer aussi les communicants au bon niveau, abonde Catherine Jacquet, directrice de projet Management, Leadership et RSE chez Cegos. À un moment, je peux m'autoriser à créer un narratif qui retranscrit exactement là où nous voulons aller, là où on va mettre la viabilité économique de notre entreprise. »

Pour cette experte, qui a choisi d’utiliser la Fresque des Nouveaux Récits dans une récente mission, la fresque permet l’appropriation collective de la stratégie. Le discours peut être porteur d’une stratégie globale et visionnaire. 

Lire aussi : Comment la RSE change le métier de communicant

Notre check-list pour une communication responsable

Reste à penser et lancer ses actions de communication responsables. Mais non sans avoir vérifié certains points.

- Des produits et services vraiment responsables

« Autrement dit, ai-je suffisamment de preuves, de données chiffrées pour communiquer sans greenwashing ? », explique Véronique Souchet. « Il y a peut-être aussi des produits de seconde main ou des services comme la réparation, le recyclage, sur lesquels on pourrait communiquer. »

- La connaissance du cadre réglementaire et des référentiels

Il est indispensable de connaître les référentiels et les mots encadrés, afin de les employer à bon escient.

- Une communication inclusive et dénuée de stéréotypes

« Cela passe aussi par le choix de héros ou d’héroïnes ordinaires qui ont déjà des modes de vie auxquels on peut s’identifier, qui sont proches des citoyens, qui sont plus crédibles, plus authentiques », ajoute notre manager d’offre et d’expertise Communication.

- Concilier sobriété et attractivité

Se démarquer de la routine ou des schémas habituels, provoquer la réflexion, éveiller la curiosité.

- Une sémantique positive et enrichie

« Passer par des émotions est essentiel. En choisissant des mots et des codes visuels positifs comme la joie, ou l’espoir, plutôt que la peur, privilégier les gains plutôt que la perte. »

- L’influence pour l’adoption de comportements soutenables

L’ARPP, l'Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité, propose un Certificat de l’Influence Responsable.

- Une communication responsable avec une empreinte carbone faible

Il y a forcément une empreinte carbone pour chacune de ses actions de communication. « Il est vraiment essentiel, à chaque fois que l’on crée du contenu ou un site web, de s’interroger sur son empreinte numérique, et de choisir le format le moins énergivore », ajoute Laetitia Guibert.

- Des expériences plutôt que des goodies

« Si une organisation propose des goodies, l’enjeu sera aussi de savoir d’où ils viennent, de quoi ils sont faits », poursuit la spécialiste. « Mais est-ce qu'on a besoin que ce soit neuf. Et pourquoi ne pas offrir plutôt des expériences plutôt que des objets ? ». On peut utiliser également à bon escient les nudges, c’est-à-dire ces incitations discrètes pour influencer des comportements.

La communication responsable ouvre des perspectives de création et d’innovation plus soutenables.

Voir notre webinar "Réinventer sa communication responsable"

Pour aller plus loin :

Expert :

Véronique Souchet

Véronique se consacre au développement de trois gammes de formation qui donnent à chacune et chacun des clés pour communiquer auprès de ses parties prenantes et valoriser ainsi son efficacité professionnelle et son employabilité.Véronique a plus de 25 années d'expérience dans la communication et le marketing.Elle a travaillé d'abord dans le secteur culturel avant de rejoindre pendant 15 ans celui du conseil en management (banque, assurance, industries et services). Vice-présidente de l'AFCI (Association Française de Communication Interne), et membre de l’Association nationale des communicants, Véronique aime contribuer à la réflexion sur les enjeux et l'évolution de la fonction communication au sein des organisations.Son approche pédagogique a pour but d’accompagner les professionnels dans la transformation digitale/IA et responsable de leurs métiers.
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