Réforme de la formation professionnelle : 3 diagnostics pour préparer (1)
De nombreuses incertitudes pèsent encore sur les modalités concrètes de la mise en œuvre de la réforme. Les listes de formations éligibles au CPF, et leurs conditions de prise en charge par l’OPCA, notamment, seront les clés de l’intérêt réel de ce dispositif. D’ores et déjà, cependant, il est possible de poser les termes du diagnostic, quitte à l’affiner au fur et à mesure de la parution des décrets et de la signature des accords.
Comme beaucoup de questions portent sur « les reversements dont l’entreprise continuera de bénéficier », je propose d’entrer par la porte « fiscaliste », celle qui consiste à comparer les obligations de dépense et les prises en charge potentielles avant et après la réforme. Dans les billets à suivre, nous examinerons l’impact de la réforme du point de vue de l’élaboration de la politique formation elle-même.
Il s’agit de mettre en perspective la structure de la dépense formation de l’entreprise aujourd’hui, avec celle de demain, « toutes choses égales par ailleurs », c'est-à-dire à engagement de dépense égal. Prenons l’exemple d’une entreprise de plus de 300 salariés.
En simplifiant, et en faisant abstraction des spécificités propres à la branche, la lecture « fiscaliste » de la ventilation de la dépense est la suivante :
Pour le diagnostic, il est intéressant de remonter sur les trois dernières année, par exemple, afin de voir quelle a été la dépense réelle, déduction faite des reversements OPCA, pour la formation.
Après la réforme, si l’on s’en tient aux affectations décidées par l’ANI (la loi n’affectant que les postes « CIF » et « FPSPP » et renvoyant la ventilation du reste de la contribution à un décret), on obtient la grille suivante :
(*) A noter cependant que les appels d’offre du FPSPP peuvent concerner le financement d’actions destinés à des salariés d’entreprise, notamment pour des actions relatives au socle de compétences.
Il y aura forcément moins de reversements qu’avant pour les dépenses relatives à la formation des salariés de l’entreprise :
- Parce que la réforme est faite pour qu’une plus grande partie des financements issus des contributions des entreprises bénéficient aux personnes sans emploi.
- Parce qu’il est à prévoir que le décret à paraître sur la durée de la période de professionnalisation ira de nouveau vers un allongement, et donc une plus grande difficulté d’accès.
Et qu'il ne paraît pas exagérément pessimiste de penser que les OPCA ne prendront plus en charge au titre de la période de professionnalisation des formations ne débouchant pas sur des certifications inscrites au RNCP, ou ne relevant pas du socle de compétences - alors que certains d'entre eux continuent à le faire aujourd'hui. - Parce que les nouvelles règles régissant le bénéfice de la péréquation reversée par le FPSPP aux OPCA encourageront ceux-ci à financer du contrat de professionnalisation plutôt que de la période.
- Parce que, hors versements volontaires ou conventionnels qui seraient effectués au-delà du 1%, il n’y a plus, selon l’ANI, de part de contribution affectée au plan de formation pour les entreprises de plus de 300 salariés.
Et, à ce jour, l'incertitude demeure sur les conditions financières de la prise en charge du CPF par les OPCA.
En reprenant le diagnostic réalisé précédemment, il est assez simple de faire une hypothèse sur les reversements qui pourraient continuer d’être perçus sur la professionnalisation – à prise en charge constante.
Et donc d’évaluer les montants qui seront désormais pleinement à charge de l’entreprise.
Et de commencer à se demander si l’entreprise a intérêt à prendre en charge en direct le financement des comptes personnels de formation de ses salariés- ce qui lui permet de ramener à 0,8% sa contribution formation (Art. L 6331-10).
Question qui, indépendamment de l’aspect financier, pose immédiatement celles du lien entre la politique formation de l’entreprise et ses anticipations en matière d’emploi et de qualifications, mais aussi de la reconnaissance des certifications obtenues.
A suivre...
Cet article a été co-écrit avec V. Voinier, consultante intervenant sur les stages Management de la Formation de Cegos.