La décision de dividendes constitue une des trois grandes décisions de finance d’entreprise : sélection d’investissement – choix de financement – décision de dividendes.

La politique de dividendes

 

Les dividendes résultent d’une décision de l’assemblée générale ordinaire des actionnaires (AGO) et n’ont rien d’obligatoire. C’est pourquoi, ils ne figurent pas en charge mais en diminution des réserves au bilan.

Les dividendes et le rendement de l’action

La formule suivante indique que le rendement pour l’actionnaire repose sur deux sources d’enrichissement : le versement d’un dividende et l’augmentation de la valeur de l’action.

Taux de rendement annuel = [(Prix 1 – Prix 0) + Dividendes] / Prix 0

Le versement d’un dividende se traduit logiquement par une baisse immédiate et du même montant de la valeur de l’action. La valeur d’une action est en effet à la valeur des capitaux propres égale à la valeur d’entreprise diminuée de l’endettement financier net. Or, l’endettement est augmenté des dividendes versés. En conséquence, le versement de dividendes ne constitue pas une rémunération, elle n’augmente pas le patrimoine des actionnaires mais en modifie seulement la répartition.

Valeurs de rendement et de croissance

Le rendement s’obtient différemment selon la catégorie de l’action :
Les valeurs de rendement versent un dividende élevé car elles sont généralement sur un secteur arrivé à maturité avec un montant d’investissements stabilisé. La part prépondérante du rendement provient donc des dividendes. Un dividende élevé atténue la variation du rendement de l’action en cas de fortes fluctuations des cours de bourse.

Les valeurs de croissance sont, comme leur appellation l’indique, sur un secteur en développement. Elles versent un dividende nul ou faible pour consacrer l’essentiel de leurs bénéfices au financement d’investissements élevés. Le rendement provient essentiellement de la progression du cours de l’action.
L’entreprise cotée doit afficher une politique de dividendes « lisible » vis-à-vis de ses actionnaires pour leur permettre de sélectionner le profil d’actions qui correspond à leurs attentes. Cette politique s’exprime essentiellement en fonction des indicateurs suivants :

Le taux de distribution (pay out ratio) : Dividendes versés année N / Résultat net année N-1

En pratique, les dirigeants définissent souvent le dividende en montant à partir d’un pourcentage appliqué aux résultats futurs. Un taux de distribution inférieur à 20% est considéré faible, un taux supérieur à 60% est considéré élevé, sachant que certains groupes ne paient pas de dividendes comme cela a été le cas pour le groupe américain Apple jusqu’au décès de son précédent dirigeant.

Le taux de progression du dividende en valeur absolue

Les dirigeants d’entreprises sur un secteur cyclique privilégient une certaine stabilité du dividende en montant en intégrant une marge de manœuvre importante au niveau du taux de distribution qui est par conséquent fluctuant.
Bien entendu, le taux de distribution n’est pas immuable, il ne fluctue pas uniquement en fonction des résultats passés, il constitue également un « signal » pour l’avenir : la baisse du dividende peut être due à l’anticipation d’une baisse des résultats ou au besoin de financement d’investissements futurs. Dans ce second cas, le groupe doit communiquer clairement aux actionnaires la cause de réduction du dividende sous peine de voir son cours de bourse diminuer.

Ainsi, avant d’être racheté par SAP, l’éditeur de logiciels Business Object avait convaincu ses actionnaires de ne pas verser de dividendes en dépit de bénéfices élevés et d’une position de trésorerie largement excédentaire. Il s’agissait d’accumuler des ressources permettant de financer le rachat de sociétés sur un secteur d’activité en phase de concentration.

A l’inverse, une hausse du dividende révèle une anticipation de hausse du résultat ou la baisse des investissements futurs.

Il y a plusieurs années, le directeur financier d’un grand groupe coté s’exprimait ainsi pur justifier un dividende exceptionnel et des rachats d’action :

Il y a plusieurs années, notre groupe avait sollicité les actionnaires pour financer des projets de développement importants. Aujourd’hui, ces projets génèrent des cash-flows importants, notre endettement a beaucoup diminué et nous n’avons pas d’investissements importants prévus. Nous sommes donc en mesure de renvoyer l’argent aux actionnaires. Quand nous avons besoin d’argent, nous les sollicitons. Ils nous le confient pour créer de la valeur et non pour obtenir un rendement obligataire. Cela n’exclut pas que si nous avons de nouveaux projets d’investissements, nous revenions vers eux.

L’exigence de rentabilité des actionnaires

La totalité du bénéfice après impôt est distribuable (en France, après constitution de la réserve légale). Le choix des actionnaires d’en laisser une partie en réserves s’assimile donc à un nouvel investissement pour lequel il a une attente de rendement. L’entreprise « crée de la valeur actionnariale » si elle réinvestit les bénéfices à un taux supérieur au coût moyen pondéré des capitaux (CMPC).

A contrario, l’entreprise « Tirelire » accumule les réserves qui année après année contribuent à augmenter un excédent de trésorerie placé au taux du marché monétaire, soit actuellement un taux nul voire négatif. Le ratio de rentabilité des capitaux propres se rapproche donc progressivement de ce taux monétaire. Ce peut être le cas du dirigeant actionnaire qui privilégie avant tout la pérennité de son entreprise au rendement des capitaux propres.

L’exigence de dividendes des actionnaires par comparaison avec un autofinancement intégral (pour autant que cela soit faisable !) a un effet vertueux sur la gestion de l’entreprise. Elle force le dirigeant à investir dans des projets dont la rentabilité procure une capacité de remboursement des emprunts pour convaincre les banquiers prêteurs et attire de nouveaux investisseurs.

D’autres moyens de rendre l’argent aux actionnaires

Différentes techniques permettent de rendre l’argent uniquement aux actionnaires qui le souhaitent :

  • Les groupes cotés peuvent racheter des actions au fil de l’eau dans la limite de 10% de leurs actions. En normes IFRS, ces actions figurent en négatif pour leur prix d’achat dans les capitaux propres ;
  • Une entreprise peut racheter les actions d’un actionnaire souhaitant se désengager pour les annuler, réduisant ainsi le capital. C’est une décision de l’assemblée générale extraordinaire (AGE) prise à la majorité des 2/3, la réduction du capital modifiant en effet les statuts.
  • Certains groupes cotés proposent à leurs actionnaires de leur verser un dividende en actions. Le nombre d’actions proposées en substitution du dividende versé en argent est défini par rapport au cours en vigueur de l’action diminué d’une décote maximale de 10% par rapport à la moyenne des 2 derniers cours. Les actionnaires ont ainsi le choix entre recevoir leur dividende en actions ou en argent. Notons un cas particulier. Fin 2014, le groupe LVMH décide de faire une distribution exceptionnelle sous forme d’actions Hermès après avoir renoncé à son OPA sur ce groupe.

Les dividendes exceptionnels

Une entreprise peut décider de verser un dividende « exceptionnel » représentant plusieurs années de résultat ou un résultat annuel exceptionnel. Un groupe réalisant une plus-value importante de cession d’un actif ou d’une filiale peut la reverser aux actionnaires. Ce dividende, non récurrent, ne constitue alors pas un signal pour l’avenir.

Le dividende exceptionnel peut être motivé par l’objectif de l’actionnaire d’accélérer son désendettement. Avec le « debt push-down » une société mère fait emprunter sa filiale pour payer un dividende exceptionnel, au risque de dégrader sa structure financière. En 2015, PICARD Surgelés a versé à son actionnaire, le fonds d’investissement Lion Capital, un dividende exceptionnel de 602 millions d’euros représentant 4,5 fois son bénéfice annuel. Ce versement a causé une augmentation de 88% de l’endettement financier de PICARD et une forte dégradation de sa notation.

La mise en paiement des dividendes

La date de mise en paiement des dividendes est décidée par l’AGO, traditionnellement, le paiement est annuel. Toutefois, de plus en plus de groupes fractionnent ce paiement par des acomptes. Par exemple, un groupe décide en juillet 2015 un acompte sur dividende payable en décembre 2015, au titre du résultat de la même année.

crédits : dividendes, © Shutterstock

Ecrit par

Michel Sion

Spécialisé dans la finance d'entreprise, Michel Sion est responsable des offres de formation Trésorerie, Finance, Gestion et Comptabilité pour non spécialistes et Risque client.
En savoir plus
);","wrap":"page-section__container","bgColorParent":"","clientId":""} -->
newsletter image

Recevez nos newsletters

Formation, Management, Commercial, Efficacité pro

Abonnez-vous