Les comptes des associations présentent certaines particularités qu'il convient de maîtriser. Elles exercent des activités très diverses : humanitaires, cultuelles, culturelles, sportives, sociales, politiques, environnementales…
Nous interviewons Monsieur Jean Marie POIRET qui a exercé plusieurs fonctions de responsabilité dans le domaine associatif. Il est actuellement consultant pour CEGOS et anime les différents stages de la gamme de stages "Gestion des associations".
Le secteur associatif est particulièrement dynamique. La France compte 1,2 million d’associations représentant 60 milliards de fonds gérés. L’activité économique des associations représente environ 4% du PIB national. Certaines associations représentent un poids économique considérable, par exemple La Croix Rouge, l’AFPA, la Ligue contre le cancer…
1- Qu'est ce qui distingue une association d'une entreprise à but lucratif
Précisons que les associations, comme les entreprises à but lucratif peuvent mener une activité économique, réaliser un bénéfice. Etant par nature à but non lucratif, elles n’ont pas le droit de distribuer ce bénéfice sous quelque forme que ce soit, les résultats sont utilisés dans l’objet social de l’association exclusivement. Une association ne peut être vendue. Cependant, elle peut réaliser un apport partiel d’actifs ou d’un pan de son activité à une autre association.
2- Qui a besoin d’analyser les comptes des associations ? Quelles questions se posent-ils ?
- Les dirigeants de l’association analysent les comptes pour assurer la gestion financière : les différentes catégories de recettes (dons, subventions, tarification des activités) et de dépenses (salaires, loyers, consommations,….).
- Les financeurs publics (Europe, Etat, Collectivités locales et territoriales) et privés (donateurs, mécènes) cherchent à évaluer les besoins de financement. Chaque financeur aime lire dans les comptes d’une association qu’il finance quel est le « tour de table » des financeurs et donc mesurer son effort financier comparativement aux autres financeurs.
- Les banquiers et organismes prêteurs, évaluent la capacité de remboursement au travers des flux de trésorerie et des équilibres financiers.
L’analyse financière permet d’une part d’identifier le modèle économique de l’association et d’autre part d’évaluer son assise financière (fonds propres, fonds de roulement et couverture du BFR…)
3- Quelles règles comptables et quelles spécificités ?
Les petites associations se limitent à une simple comptabilité de trésorerie, ne retraçant que les encaissements et décaissements. Des règles spécifiques de comptabilisation n’ont été définies qu’à partir de 1998 dans un souci de transparence et applicables à compter de 2000. C’est ainsi que les associations ayant atteint une « certaine taille » (50 salariés, 3,1 million de CA, 1,550 million de bilan) doivent tenir une comptabilité d’engagements, désigner un CAC et publier leurs comptes au JO des associations.
De nombreux textes sectoriels précisent également les seuils déclencheurs d’une obligation de comptabilité d’engagements : Formation Professionnelle, CFA, financement électoral…
Le Plan comptable des associations et fondations a adapté le PCG sur 9 points spécifiques à ces organismes sans but lucratif dont :
- La notion de fonds associatif qui permet de constituer des réserves pour améliorer les fonds propres. De nombreuses associations ayant été fondées sans fonds propres initiaux.
- La Valorisation du bénévolat et des contributions volontaires (mises à disposition de ressources matérielles, humaines…) qui permet de mieux mesurer l’activité réelle et de donner du sens au modèle économique. Ces montants sont à la fois inscrits en charges et en produits dans les comptes de la classe 8.
- Le Résultat sous contrôle du tiers financeur : le financeur se réserve le droit de récupérer ce résultat qui provient d’un financement non utilisé. Ce résultat ne pourra être considéré acquis que si le financeur y renonce officiellement.
- Les Fonds dédiés qui permettent un suivi année par année des financements affectés à des actions à réaliser par l’association.
Par ailleurs, celles qui font appel à la générosité publique et recueillent plus de 153.000 € par an doivent établir un Compte Emplois-Ressources qui justifie l’emploi des ressources collectées.
4- Les associations ont elles également besoin de réaliser une comptabilité analytique ?
Oui, dans de très nombreuses associations, une comptabilité analytique ou par section homogène s’impose en plus des documents globaux pour tracer l'utilisation des financements par activité et évaluer isolément le résultat des différentes activités menées au sein d’une même association.
Elle garantit aux financeurs qui souhaitent ne soutenir qu’une activité ou un projet spécifique que les fonds qu'ils ont apporté sont bien affectés à cette activité ou à ce projet. Par exemple, un financeur souhaite ne financer que l'hébergement des SDF dans une association qui poursuit un objet social plus global d’insertion sociale...).
Notons que la notion de subvention a reçu une définition légale le 31 juillet 2014 dans la Loi sur l’Economie Sociale et Solidaire pour la distinguer des financements de prestations de service ou de marchés publics confiés à des associations. Il faut réserver le terme « subventions » aux contributions d’une collectivité qui apporte un soutien à un projet dont l’association a pris l’initiative.
5- Quel message souhaitez vous envoyer aux responsables financiers d'associations ?
J'observe souvent une difficulté culturelle des associations à rechercher des fonds propres et à comprendre l’importance du FR. L’analyse des comptes de nombreuses associations révèle le plus souvent des fonds propres insuffisants pour financer la croissance de leur activité ou assurer leur pérennité dans un contexte de raréfaction des financements publics.
Nombreuses sont encore les associations qui sont dépendantes de leurs financeurs « traditionnels » et qui n’ont pas le réflexe d’engager une recherche de diversification de leur financement auprès des particuliers ou des entreprises. En ce sens, une démarche plus active de recherche de financement s'impose.