La norme IFRS 10 définit la notion de contrôle

Michel SionManager Offre et Expertise Finance Cegos

Le contrôle est défini par la norme IFRS 10 « états financiers consolidés » adoptée par l’IASB en 2011 et qui s’applique depuis le 1er janvier 2013. Elle a totalement renouvelé et unifié la notion de contrôle.

IFRS 10 avait été initiée à la suite de la crise financière ayant démarré en 2008. En effet, dans le déroulement de cette crise, les instances réglementaires avaient remarqué qu’un grand nombre d’entités comportant des risques financiers élevés demeuraient déconsolidées tant au bilan des banques que des groupes industriels et commerciaux.

Qu'est-ce que l'IFRS 10 ?

IFRS 10 donne une définition unique de la notion de contrôle et remplace ainsi les deux textes qui existaient précédemment :

  • La norme IAS 27 s’appliquait aux entités « classiques » pour lesquelles le contrôle s’obtient essentiellement par les droits de vote. Elle définissait le contrôle comme étant « le pouvoir de diriger les politiques financière et opérationnelle d’une entreprise afin d’obtenir des avantages de ses activités » ;
  • L’interprétation SIC-12 définissait la notion de contrôle économique ou en substance applicable aux entités « ad hoc » dans le but de lutter contre les montages déconsolidants (voir partie 2, entités structurées).

 IFRS 10 donne une définition unique du contrôle d’une entité reposant sur trois conditions cumulatives :

  • Pouvoir de diriger les activités pertinentes de l’entité ;
  • Exposition aux rendements variables de l’entité, positifs comme négatifs ;
  • Capacité d’agir sur ces rendements, c’est-à-dire qu’il existe un lien entre le pouvoir et les rendements.
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IFRS 10 et activités pertinentes

Les activités pertinentes sont celles qui affectent significativement les rendements. En pratique : droit de nommer et de révoquer les dirigeants, de fixer leur rémunération, de définir ou valider les orientations stratégiques et leurs plans d’action opérationnels, les choix d’investissements, de valider les budgets. En somme, il s'agit de déterminer les politiques opérationnelles et financières.

La notion d’activité pertinente a donc un rôle « inclusif » permettant de définir le contrôle tant pour les activités « classiques » où le contrôle s’exerce par les droits de vote que pour les entités « ad hoc » pour lesquelles le contrôle économique s’exerce grâce à des clauses contractuelles ou statutaires.  

Pour qualifier le pouvoir, IFRS 10 distingue deuxcatégories de droits :

  • Les droits « substantifs » donnent en pratique la capacité de diriger les activités pertinentes de l’entité. Seuls ces droits sont considérés pour qualifier le pouvoir ;
  • Les droits « protectifs » ont pour objet de protéger les droits de leur détenteur (droits de véto d’un minoritaire sur un investissement exceptionnel, d’agrément d’un nouvel actionnaire, etc.). En soi, ces droits ne suffisent pas pour détenir le pouvoir ni à empêcher un autre investisseur de détenir le pouvoir. Toutefois, un droit de véto portant sur une activité pertinente sera qualifié de droit substantif.

Selon IFRS 10, la détention de plus de lamoitié des droits de vote ne confère le contrôle que si ces droits de vote sontsubstantifs, c’est-à-dire s’ils permettent de diriger effectivement lesactivités pertinentes. Il n’est plus fait explicitement référence à la notionde contrôle exclusif au-delà de 50% des droits de vote.  

IFRS10 reconnaît qu’il est possible de diriger seul les activités pertinentes etdonc de contrôler une entité en détenant moins de 50% des droits de vote, c’estce que l’on appelle le contrôle de fait. La norme en donne des exemples :

Le contrôle de fait

  • L’investisseur détientle plus large bloc de titres, le reste de l’actionnariat étantdispersé (majorité relative) ;
  • Il n’existe pas d’accordentre les autres investisseurs pour voter collectivement contre lespropositions émises par l’actionnaire majoritaire ;
  • L’investisseur nommela majorité des membres des organes de contrôle et de direction ;
  • L’analyse del’historique des décisions prises en assemblée générale montre que lesdécisions proposées par l’investisseur sont généralement adoptées.

Pourdéterminer s’il y a un contrôle de fait, il convient donc d’exercer sonjugement en analysant tous les faits et circonstances.

Illustration

Depuis 2017, le groupe Vivendi est consolidé selon la méthode de l’intégration globale dans les comptes du Groupe Bolloré alors que ce groupe ne détient que

Le rapport annuel 2017 du Groupe Bolloré justifie le contrôle à partir des éléments suivants  :

« Le Groupe Bolloré est unique actionnaire de référence de Vivendi dispose d’un poids actionnarial renforcé par les effets de la loi Florange, avec pour la première fois les droits de vote double associés à ses actions.

Uneanalyse approfondie des droits détenus par le groupe et de la dynamique propreaux assemblées de Vivendi observée historiquement montre que le groupe y détientprès de la majorité des voix dans un contexte actionnarial très dispersé ;

Le groupe a alors procédé à l’analyse des autres faits et circonstances susceptibles de démontrer l’existence du contrôle. Il y a notamment les transferts de managers et dirigeants, la capacité physique à diriger les processus clés de chacune des activités, la convergence et les synergies entre les deux groupes ainsi que le financement ».

Les normes américaines ne reconnaissent pas le contrôle de fait. Ainsi, une filiale contrôlée à 50 % ou moins peut être intégrée globalement dans les comptes d’un groupe en normes IFRS/IAS et mise en équivalence en normes américaines.

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Le contrôle des entités structurées

Dans le déroulement de la crise de 2008, les instances réglementaires avaient remarqué qu’un grand nombre d’entités comportant des risques financiers élevés demeuraient déconsolidées tant au bilan des banques que des groupes industriels et commerciaux. Nous examinons ici le cas des entités structurées et de l'IFRS 10 est une entité créée spécifiquement pour réaliser une opération ou une série d’opérations pour le compte d’une entreprise. Le contrôle sur une entité ad hoc s’exerce non par la détention de la majeure partie des droits de vote mais par le fait pour l’entreprise de prendre les décisions opérationnelles et de bénéficier de la majeure partie des avantages et supporter la majeure partie des risques de l’entité.

Ce contrôle peut s’exercer sans qu’il y ait de lien en capital, notamment grâce à des clauses contractuelles ou statutaires.  

L’entité ad hoc a été le plus souvent initiée par l’entreprise au service de laquelle elle travaille et son activité prédéterminée par elle. L’entreprise réalise des transactions avec l’entité ad hoc : elle lui transfère des actifs, obtient le droit d’utiliser ses actifs, l’entité réalise des services pour le compte de l’entreprise, etc. D’autres parties apportent, quant à elles, les capitaux nécessaires pour financer les actifs. L’entreprise peut ne pas être actionnaire de l’entité ad hoc ou alors de façon très minoritaire. Cette entité peut prendre des formes juridiques très diverses :

  • société de capitaux ou de personnes,
  • GIE,
  • coopérative,
  • entité sans personnalité morale (cas de la titrisation), ce qui la rend parfois difficile à appréhender.

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Les droits de vote

Selon l'IFRS 12, une entité structurée est une entité conçue de telle manière que les droits de vote ne constituent pas le facteur déterminant pour savoir qui contrôle l’entité. C’est notamment le cas lorsque les droits de vote concernent uniquement les tâches administratives et que les activités pertinentes sont dirigées au moyen d’accords contractuels.

De nombreux groupes avaient réalisé ces montages juridiques complexes pour déconsolider des actifs (stocks, créances client, immobilisations…) et la dette finançant ces actifs afin d’améliorer les ratios d’endettement.  

Désormais, IFRS 10 se base sur la notion de pouvoir sur les activités pertinentes de l’entité structurée pour déterminer si celle-ci doit ou non être consolidée.

Illustration

Le groupe TOUAX assure la location de wagons ferroviaires, de barges fluviales et de conteneurs maritimes. Pour accroître sa capacité de loueur opérationnel, le groupe fait appel à des tiers qui investissent dans des sociétés détenant les actifs mis en location. L’analyse des contrats liant le groupe TOUAX aux sociétés de gestion d’actif permet de déterminer qui assure le pouvoir sur les activités pertinentes.

La société SRF I a été créée dans le but d’investir dans des actifs et n’a pas été constituée pour les besoins opérationnels du groupe. Donc, TOUAX n’a pas le pouvoir de décision ou de gestion de SRF I. Le conseil d’administration prend les décisions relatives à la stratégie sur la base des recommandations d’un comité consultatif de l’actionnaire majoritaire. La majorité des avantages liés à l’activité de SRF I reviendra à son actionnaire majoritaire.

Le groupe TOUAX reçoit une commission de gestion pour la gestion de wagons de SRFI I. Le taux de commission est un taux de marché et engage en contrepartie des frais de gestion pour un montant très sensiblement équivalent. Par conséquent, le groupe n’exerçant pas le contrôle de SRF I au sens d’IFRS 10 et IFRS 11, SRF I ne fait pas partie du périmètre de consolidation au 31 décembre 2017.



L’interprétation SIC 12 utilisait l’expression « entité ad hoc ». Désormais, IFRS 12 utilise l’expression entité « structurée », entité ad hoc se traduisant en anglais par « Special purpose vehicle (SPV).

Ecrit par

Michel Sion

Spécialisé dans la finance d'entreprise, Michel Sion est responsable des offres de formation Trésorerie, Finance, Gestion et Comptabilité pour non spécialistes et Risque client.
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