Analyse de rentabilité de projets de centrales éoliennes

Michel SionManager Offre et Expertise Finance Cegos

La préoccupation écologique et le souci d’indépendance énergétique font de l’énergie renouvelable un axe économique majeur. A la suite des projets éoliens terrestres, des fermes éoliennes en mer verront le jour au large du littoral français vers 2018. Une étude menée en 2014 par la commission de régulation de l’énergie (CRE) analyse les coûts et la rentabilité des différents projets d’énergie renouvelable (éolien terrestre, biomasse, solaire photovoltaïque) en France métropolitaine. Nous vous présentons la démarche suivie par l’étude et les résultats concernant les projets éoliens.

Analyse de rentabilité de projets de centrales éoliennes

 

I. Le cadre réglementaire et l’objectif de l’étude

L’objectif de l’étude de la CRE est d’éviter que l’obligation d’achat d’électricité aux opérateurs privés ne leur procure des rendements excessifs compte tenu du niveau de risque de leur investissement.

Le code de l’énergie impose en effet aux opérateurs historiques (EDF et les entreprises locales de distribution) une obligation d’achat d’électricité notamment vis-à-vis des producteurs utilisant une énergie renouvelable. En vertu du code de l’énergie, la CRE émet un avis sur les arrêtés tarifaires fixant les conditions d’achat de l’énergie renouvelable. L’article 314-7 dispose que « le niveau du tarif des obligations d’achat ne peut conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés dans les installations excède une rémunération normale des capitaux, compte tenu des risques inhérents à ces activités et de la garantie dont bénéficient ces installations d’écouler l’intégralité de leur production à un tarif déterminé ».

Deux modes de fixation du prix d’achat existent :

Le recours à un tarif d’achat prédéfini par voie réglementaire. Ce tarif est défini à partir de coûts d’investissements et d’exploitation moyens. Indifférencié, ce tarif ne prend pas en compte les différences de performance économique résultant notamment des conditions de vent propres à chaque site et du coût de l’investissement initial, ces deux paramètres étant toutefois connus à l’avance. Il peut donc conduire à un coût d’achat excessif pour les sites qui offrent les meilleures conditions de vent. Toutefois, un mécanisme contractuel vise à réduire le caractère excessif du rendement d’une exploitation. Les contrats sont définis sur une durée de 15 ans. Sur une première période de 10 ans, le tarif d’achat est uniforme. Sur une seconde période de 5 ans, ce tarif est revu à la baisse selon un barème pour les implantations bénéficiant des conditions de vent les plus favorables.

La procédure d’appel d’offres est généralement choisie pour les projets les plus importants. La mise en concurrence est censée permettre d’abaisser le prix d’achat et de limiter les rendements excessifs. Les opérateurs privés soumettent en effet à l’appel d’offres en tenant compte des caractéristiques propres au site où le projet sera réalisé.
La CRE a donc mené une étude sur un échantillon représentatif de 52 parcs éoliens terrestres répartis en France métropolitaine pour évaluer leur rentabilité et émettre des recommandations sur l’évolution des tarifs d’achat.

Les principales caractéristiques de l’échantillon sont :

  • La date de mise en service se situe entre 2007 et 2012. Cette date est importante pour évaluer le coût d’investissement.
  • Le gisement éolien se situe entre 1550 et 3900 heures de fonctionnement par an.

En raison du décalage temporel entre l’investissement initial et les revenus d’exploitation, seuls des calculs actuariels rendent compte de la rentabilité des projets. Comme pour tout appel d’offres comportant un investissement initial et des flux pluriannuels, le taux de rentabilité interne (TRI) attendu permet de négocier un prix de vente assurant la rentabilité demandée par le fournisseur.

II. Les caractéristiques des flux de trésorerie des projets éoliens.

Le coût de l’investissement initial (FTI) représente la majeure partie des coûts d’un parc éolien terrestre (environ 75% des coûts totaux (somme de la dépense d’investissement initial et des coûts d’exploitation actualisés sur la durée du contrat).

L’investissement initial comprend les études préalables, les travaux de génie civil, le coût d’achat de l’éolienne (l’aérogénérateur représente à lui seul les trois quarts du coût de l’investissement), les coûts de raccordement au réseau, les frais financiers intercalaires (frais financiers relatifs à la période de construction et intégrés au coût de l’infrastructure), du coût estimatif du démantèlement en fin d’exploitation.

Le coût d’investissement exprimé en (k€ /MW) varie fortement selon les projets en fonction :

  • de la taille de l’installation
  • de la date d’investissement.

Une tension conjoncturelle sur le prix de l’acier en 2008 a causé une hausse du coût des éoliennes avant qu’elles ne diminuent. Depuis, la tendance des prix est à la baisse.

Les charges d’exploitation comprennent quant à elles essentiellement les coûts de maintenance (salaires, pièces détachées) puis les coûts de fonctionnement, les assurances, les loyers et les taxes locales ;

Finalement, un coût de démantèlement est prévu à la fin de la période d’exploitation pour lequel une garantie bancaire forfaitaire de 50 000 € est obligatoirement constituée.

La durée retenue par l’étude pour évaluer la rentabilité est de 20 ans, identique à la durée de vie estimée par les producteurs et non la durée utilisée pour négocier les prix de vente.

Les revenus sont définis en fonction des conditions contractuelles. La durée du contrat d’achat d’électricité éolienne n’étant que de 15 ans, une hypothèse de prix de vente sur les marchés de gros est retenue pour les cinq dernières années.

III. Evaluation de la rentabilité des projets éoliens.

L’objectif de l’étude est déterminer les facteurs essentiels qui conditionnent le TRI projet.
Le TRI projet

TRI EOLIENNE

Le tableau ci-dessus montre que le TRI projet des entreprises de l’échantillon varie entre 2,3% et 11,8%. Les deux facteurs essentiels explicatifs de la rentabilité sont le productible et le coût de l’investissement par MW.
L’étude estime qu’un TRI proche de 12% est excessif compte tenu du niveau d’aléas assez faible de ce type de projet : coût de l’investissement et « productible » connus à l’avance, obligation d’achat de l’électricité par les opérateurs historiques à un prix pré défini.

Le TRI actionnaire

La CRE a également cherché à évaluer le TRI actionnaire (ou rentabilité des capitaux propres). Ce dernier dépend bien entendu à la fois du TRI projet et de la structure de financement. Le projet éolien se réalise habituellement dans une société de projet dédiée. Les développeurs de projets éoliens recourent en majorité à un financement de projet classique avec une répartition capital / emprunt moyenne de 20/80. Ce fort effet de levier contribue à augmenter le TRI actionnaire de façon significative au-dessus du TRI projet. Dans certains cas, le TRI actionnaire n’a pu être calculé faute d’apport d’actionnaire. C’est le cas d’une société de projet financée intégralement par emprunt bancaire garanti par sa maison mère. L’étude ne tire pas de conclusion particulière du TRI actionnaire.

Conclusion

La CRE a émis deux grandes préconisations en conclusion de l’étude pour limiter les rendements excessifs  :
Privilégier la procédure d’appel d’offres pour mettre en concurrence les opérateurs privés notamment sur les prix;
Définir le tarif d’achat réglementaire de l’électricité en se basant sur une durée d’exploitation de 20 ans pour rentabiliser l’exploitation, plus proche de la réalité que la durée actuelle de 15 ans.

 

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Ecrit par

Michel Sion

Spécialisé dans la finance d'entreprise, Michel Sion est responsable des offres de formation Trésorerie, Finance, Gestion et Comptabilité pour non spécialistes et Risque client.
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