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"Mon Pareto ne fait pas 80-20, est-ce grave docteur ?"

Philippe PetitManager Offre et Expertise Achats - Secteur Public - International Cegos

Certains professionnels, notamment des achats, sont désemparés de ne pas retrouver ce qu’ils pensent être "la bonne forme de courbe"… Nous allons voir que non seulement tout va bien, mais aussi que l’on peut tirer des enseignements très utiles de ce constat. Mais commençons par rappeler ce que représentent vraiment "80-20" et "ABC".

Le "20" n'est pas celui qu’on pense !

Tout débute par cette confusion comme quoi, par exemple, "20% des fournisseurs devraient représenter 80% du montant des dépenses achats". En fait, on devrait limiter le constat à "très peu de fournisseurs représentent… ". Même s’il est vrai que très souvent ce "très peu" se situe aux alentours de 20%, ce n’est pas une fin en soi, mais un constat préliminaire à effectuer… et dans le bon sens. En effet, le « 20% » n’est que le complémentaire du « 100% ».

Reprenons notre exemple en procédant en 2 temps :

  1. Qui sont les fournisseurs représentant en cumul 80% du montant des dépenses achats ?

On s’aperçoit ainsi que dans cet exemple le "très peu" se situe plutôt aux alentours de 30% et nous verrons plus tard comment interpréter cette information précieuse.

2. Comment se répartissent les 20% restant ?

Conventionnellement on repère qui sont les fournisseurs ne représentant en cumul que les 5% finaux. Et à l’inverse de tout à l’heure, ils sont très nombreux ceux chez qui vous dépensez très peu.     

Passer de "80-20" à "ABC" et prioriser ses actions

C’est très simple et ça n’a rien à voir avec le Activity Based Costing des contrôleurs de gestion. Les "peu nombreux" sont les "A", les "très nombreux" les "C" et entre ces deux catégories nous découvrons les "B".

Comme vous le savez, chacune de ces catégories fait l’objet d’un traitement différencié :

  • Les A : ils focalisent votre attention, ils sont prioritaires. Dans notre exemple, ce sont des fournisseurs vis-à-vis de qui les négociations tarifaires ont un très gros impact.
  • Les C : dans la mesure du possible, il faut réduire leur nombre car ils représentent un poids administratif. Un compte fournisseur coûte autant à votre entreprise, que les montants de dépenses soient importants ou non. En accord avec vos clients internes, vous pouvez ainsi envisager de répartir les montants vers d’autres fournisseurs. On parle de "rationalisation" du panel fournisseur, mais attention à ne pas se séparer d’un petit fournisseur indispensable.
  • Les B : on ne s’en occupe qu’une fois que les deux précédentes ont été traitées, c’est à dire s’il vous reste encore du temps… Cela dit, les B peuvent recevoir des volumes issus des C dont on se sépare.

Maintenant que nous savons établir le "vrai" 80-20 avec ses 3 catégories, voyons maintenant comment interpréter la forme parfois inhabituelle de la courbe Pareto.


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Le "Pareto pur" et les autres…

Oui, il existe bien des Pareto donnant des courbes où 20% des "A" représentent "80%" du total du critère analysé, les dépenses achats dans notre exemple ci-dessus. En outre, il est rassurant d’observer que les "C" représentent 50% du panel, et 30% pour les B restant. Dans ce cas-là, on a affaire à un "Pareto pur", celui qu’on a le plus de chances de rencontrer, statistiquement donc et quelle que soit la population (fournisseur, par exemple) étudiée.

Par conséquent, s’il n’est pas "pur", c’est que quelqu’un "a ratissé avant vous", c’est-à-dire a déjà troublé la répartition statistique (naturelle) des éléments étudiés. Cette personne, votre prédécesseur (?), a vraisemblablement déjà mis en œuvre les recommandations rappelées plus haut concernant le traitement des 3 catégories. Donc potentiellement, il reste peu de choses à rationaliser ("C"), mais toujours et encore se concentrer sur les "A" tout en limitant l’introduction de nouveaux "C". Cela revient finalement à "linéariser" le panel, c’est-à-dire à équilibrer la répartition entre les 3 catégories.

Et rassurez-vous, il reste toujours quelque chose à faire, notamment d’autres analyses Pareto : citons les ABC Produits ou Prestations achetés, Risques fournisseur, Puissance d’achats, Taux d’interdépendance fournisseur… Vous pouvez aussi tenter des Pareto croisés (Fournisseurs/Montants avec Produits achetés/Montants, par exemple) pour continuer de monter la barre et envisager des cartographies de portefeuille avec la Matrice de KRALJIC (voir le billet sur le sujet ici) puis des synthèses SWOT par famille d’achat, etc.


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Tout va bien !

J’espère que vous voilà rassuré ! Un Pareto qui tend à s’aplatir pour ressembler finalement à un "33-33-33" parfaitement équilibré, c’est normal dès lors qu’un professionnel s’en occupe. Pareto, ou plutôt les analyses Pareto, restent des outils incontournables car faciles et rapides à utiliser à condition d’en tirer tout le (bon) jus. Il faut cependant rester vigilants quant aux risques de conclusions tirées trop hâtivement ; souvenez-vous toujours que « les achats proposent, les clients internes disposent ».

Ecrit par

Philippe Petit

Avant de rejoindre Cegos, Philippe a pratiqué achats et ventes, notamment dans le secteur de l'automobile et la distribution spécialisée.Il conçoit, développe et fait développer des formations achat et anime un réseau d'intervenants, acheteurs, juristes et financiers. Il dirige également une formation diplômante "Responsable achats".Par ailleurs, il est auteur et co-auteur de :• Toute la fonction achats, Dunod• La boîte à outils de l’acheteur, Dunod• Toute la fonction management, Dunod
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