Management inclusif : les clés pour une équipe engagée
Votre management est-il un management inclusif ? Vu les chiffres de l’inclusion en entreprise en France, la réponse ne va pas de soi. Selon une récente étude, 74 % des salariés disent avoir déjà été témoins de discrimination. Et seulement 21 % des managers se sentiraient suffisamment épaulés pour y remédier. Interrogeons-nous sur ce qu’est vraiment un manager inclusif et comment se lancer…
- Inclusion en entreprise : de quoi parle-t-on ?
- Quel est le rôle du manager dans une démarche d'inclusion ?
- À quoi ça sert d'adopter un management inclusif ?
- À quoi reconnaît-on un manager peu ou pas inclusif ?
- Management inclusif : par quoi commencer pour passer à l'action ?
- Quelles compétences pour être un manager inclusif ?
- Peut-on être un manager inclusif quand on n'est pas poussé par l'entreprise ?
Inclusion en entreprise : de quoi parle-t-on ?
Depuis la crise sanitaire, c’est un sujet émergent dans les organisations, une attente des collaborateurs, voire une exigence de certains candidats. Viser l’inclusion, c’est bien sûr lutter contre toutes les formes de discrimination en vertu de l’article L .1132-1 du Code du Travail. Au quotidien, c’est animer une équipe avec des profils différents. Et, plus encore, c’est insuffler une nouvelle dynamique auprès de ses collaborateurs.
« Un management inclusif part du postulat que les différences sont une richesse pour l’entreprise, résume Annette Chazoule, manager de l’Offre Management et Changement chez Cegos. Il lutte contre la discrimination dans l’esprit de la loi. Mais il fait aussi le pari de l’intelligence collective au service de la qualité de vie au travail, l’agilité de l’organisation et finalement, sa performance. »
C’est aussi un vrai défi dont l’ampleur apparaît dans le dernier Baromètre Cegos consacré à la diversité et l’inclusion dans les organisations, paru en juin 2022 (Les Enjeux compétences d’une transformation culturelle).
Parmi les enseignements de l’étude :
- 54% des salariés en France disent avoir déjà été victimes d’au moins une forme de discrimination.
- Parmi les formes de discrimination les plus fréquemment rencontrées, les Français citent l’âge (32 %), les activités syndicales (22 %), l’état de santé (20 %) et le sexe (18 %).
- Seuls 31 % de salariés pointent l’engagement de l’équipe dirigeante pour porter ces valeurs d’inclusion au plus haut niveau de l’entreprise…
Quel est le rôle du manager dans une démarche d'inclusion ?
Face à un tel défi, le rôle du manager est multiple. Déjà, il participe souvent au recrutement. Il suggère ou appuie des promotions de collaborateurs aussi. Et en chaque circonstance, il devra combattre pas moins de 24 critères de discrimination rappelés par l’association À Compétences égales. « Au contact direct de ses équipes, le n+1 est un acteur-clé, insiste Annette Chazoule. Il peut commencer par un premier auto-diagnostic et se poser les bonnes questions. Souvent, on recrute ou on favorise des profils qui nous ressemblent. Un manager peut donc se demander si son équipe manque de diversité. »
38 % des salariés en France décrivent leur manager direct comme un allié solide face à ces enjeux. Mais son rôle ne saurait se limiter aux ressources humaines. « Il joue un rôle essentiel dans l’animation de son équipe au quotidien. À ce titre, on peut comparer le manager inclusif à un chef d’orchestre qui saura intégrer divers instruments pour donner un sens harmonieux à l’ensemble. Il va donner le "la" et insuffler une politique générale qui profitera à tous. »
À quoi ça sert d'adopter un management inclusif ?
Il y a de nombreuses raisons de promouvoir un management inclusif. Pour 56 % des salariés interrogés, la diversité contribue à la performance globale de l’organisation. L’association À compétence égale, s’appuyant sur plusieurs études, estime que certaines entreprises peuvent observer jusqu’à 30 % de chiffre d’affaires supplémentaire par salarié. « Selon différentes études, on estime en moyenne un impact sur le chiffre d’affaires global d’environ 15 %, abonde Annette Chazoule. Les bénéfices de l’inclusion ne sont pas forcément quantifiables, mais ils seront très réels et ont un impact sur la qualité de vie au travail. »
Au niveau des ressources humaines, un management inclusif participe à la rétention des talents, mais aussi à l’attractivité globale de l’organisation et à sa marque employeur. En France, 77 % des salariés affirment ainsi que la prise en compte des enjeux d’inclusion serait un critère "important" de choix d’un nouvel employeur. D’ailleurs, l’inclusion bénéficie aussi au manager lui-même. Il demeure aussi un salarié, souvent fier de piloter ses équipes en fonction de ses valeurs ou de nouvelles attentes sociétales…
À quoi reconnaît-on un manager peu ou pas inclusif ?
Preuve que des progrès restent à faire, nombre d’entre nous avons sans doute déjà assisté à des situations similaires :
- Un manager qui fait - ou laisse dire - des blagues sexistes, homophobes, grossophobes, liées à l’âge…
- Un manager qui organise une réunion qui risque de déborder après 18h
- Lors d’une mission auprès d’un client, envoyer une délégation où tous les collaborateurs se ressemblent un peu (âge, sexe, apparence…)
- Lors d’une présentation, un manager qui monopolise la parole
- Un manager hostile à une organisation du travail transversale
En France, 54 % des salariés disent avoir déjà été victimes d’au moins une forme de discrimination. Or ces actes seraient perpétrés en premier lieu par des collègues puis par les managers directs.
« À l’inverse, certaines postures volontairement inclusives imprimeront durablement et positivement les esprits, que ce soient des collaborateurs ou des clients, observe Annette Chazoule. Imaginez par exemple une mission en délégation à forte valeur ajoutée, où tous les collaborateurs clairement, ne sortiraient pas du même moule, avec différents sexes, âges, origines, formations ou rapport au handicap par exemple. Imaginez un interlocuteur qui distribue la parole entre tous. L’inclusivité, cela surprend et cela se retient. »
Management inclusif : par quoi commencer pour passer à l'action ?
Mais pour y parvenir, encore faut-il adopter quelques bonnes pratiques et savoir lesquelles. « Pour se lancer, je recommande souvent une formation sur les biais cognitifs et les stéréotypes, commente Annette Chazoule. Personne n’est à l’abri des préjugés. Il est sain d’apprendre à penser contre soi-même et de sortir de sa zone de confort. » Idéalement, toutefois, il ne faut pas agir seul et être accompagné par sa direction. « Pour aller plus loin, on pourrait imaginer des parcours de formation avec des sensibilisations au management intergénérationnel, la parité, la diversité. »
Mais notre experte invite aussi à revoir ses compétences relationnelles. « Pour cela, des formations dites de softs skills, comme la Process Com, pour mieux connaître l’autre, ou la CNV (communication non-violente), pour mieux communiquer, sont très pertinentes. Elles permettent de mieux comprendre les autres et parfois d’identifier et de surmonter des résistances. » Car au fond, le management inclusif, n’est-ce pas aussi prendre en compte chaque individualité ?
Quelles compétences pour être un manager inclusif ?
Reste à savoir si tous les managers peuvent devenir inclusifs. Sur le papier, n’importe quel n+1 peut progresser sur la question, à condition quand même d’afficher quelques prédispositions nécessaires. « L’inclusion ne se fait pas sans effort, reconnaît Annette Chazoule. Elle suppose déjà beaucoup d’humilité et la capacité à se remettre en cause. Il faut être prêt à apprendre. Et ensuite, sur le terrain, cela suppose un engagement et une vigilance de tous les instants. »
Parmi les postures et les soft skills attendus on peut citer :
- Avoir assez d’humilité, voire demander de l’aide,
- Savoir regarder et écouter ce qui se passe autour de soi,
- Avoir le courage de ne tolérer aucun propos ni comportements déviants,
- Accompagner ses équipes en mode coaching,
- Encourager l’intelligence collective,
- Organiser des actions ou campagnes de sensibilisation…
Peut-on être un manager inclusif quand on n'est pas poussé par l'entreprise ?
Mieux vaut, on l’aura compris, être soutenu. Or à ce jour, selon l’étude Cegos, seuls 21 % des managers français (contre 34 % du panel international) estiment que leur organisation les aide à gérer les situations sensibles liées à la diversité et l’inclusion. « La marge de progrès est donc réelle, reconnaît Annette Chazoule. Cependant, même sans encouragement, il faut se lancer, s’interroger, et manager en fonction de ses convictions personnelles. En espérant, par l’exemple et les chiffres, insuffler de bonnes pratiques, vers le haut et vers le bas… »
Ce sera sans doute plus long, mais pas sans bénéfice. Surtout, qu’à terme, les organisations auront-elles le choix ? « Dans un contexte de guerre des talents, c’est un enjeu de moins en moins négociable, prévient notre experte. Quand ils arrivent, il y a une attente forte des nouveaux collaborateurs, et tout particulièrement chez la tranche 18-30 ans. Il faut que l’entreprise reflète la société actuelle. Si elle ne le fait pas, elle se met en décalage avec ce que vivent les gens et donc en danger pour notamment attirer des talents et les fidéliser. »